Sauts de puce (de mer) en Martinique
Alors qu’Eric traversait l’Atlantique, les filles et moi-même sommes rentrées en France pour deux semaines. Deux semaines qui nous ont permis de nous repaître de tout ce qui a pu nous manquer : la famille, les amis, la culture, la bonne cuisine. Que c’était bon !
Deux semaines qui nous ont aussi permis de mesurer la chance que nous avions de pouvoir prendre le temps de vivre sur Moutik…
Il faut dire qu’entre la fatigue de la fin d’année, le temps maussade, les gilets jaunes et leur lot de tensions, l’attentat de Strasbourg et les courses de Noël… il ne faisait pas particulièrement bon vivre en France début Décembre !
Mais cela fait maintenant plusieurs mois que je réalise que ce qui me réjouit le plus dans cette aventure, c’est notre rapport au temps. Je me lève quand mon corps décide qu’il a assez dormi… je mange quand j’ai faim… je décide de ne rien faire de la journée ou à l’inverse de profiter de chaque minute qui passe pour découvrir notre villégiature d’un jour… je fais l’école en pyjama si le petit déjeuner a traîné en longueur… je m’offre le luxe de suivre mon cerveau dans ses divagations, sans but particulier si ce n’est le plaisir de sentir ma matière grise frémir… j’improvise un dîner avec des amis de ponton etc… ce qui n’empêche que je n’ai pas le temps de faire tout ce que j’aimerais faire, mais ce n’est plus un stress ni une source de frustration.
Bref, le temps redevient une richesse et non une denrée rare.
Alors je me dis qu’il faudra que nous trouvions un moyen de préserver un tant soit peu cette qualité de temps quand nous rentrerons à Paris, tout bêtement parce que c’est bon pour nous.
Pour faire la transition entre l’effervescence parisienne et notre vie sur Moutik, nous avons vécu une petite parenthèse idéale à St Martin chez nos amis Mapie et Dominique. Une semaine à voir la mer de la terre, ça fait aussi du bien. Entre un repas de Noël plus que festif, les déjeuners mémorables chez Karibuni (et oui maman, leur Pina Colada est toujours aussi bonne !) sur l’ilet Pinel, la balade en bateau jusqu’à l’ile de Tintamarre et les après-midis au bord de la piscine, ce Noël 2018 fut un très bon cru!
Puis le 27 Décembre, nous retrouvons enfin Moutik. Dès le premier soir l’équipage de Pouplier, un “bateau-copain” (expression consacrée bien connue des circumnavigateurs) que nous recroisons régulièrement et avec plaisir depuis Rabat, nous attend avec l’apéro. Cet accueil fait chaud au cœur. Et dès le premier rhum, les discussions vont bon train sur la suite à donner à notre voyage.
Nous apprenons qu’en notre absence, un nouvel an s’est « organisé » entre Pouplier, Louise-Anna et Moutik.
Après une balade dans le Nord de la Martinique pour visiter le charmant jardin de Balata et un tour dans l’hyperU gigantesque du Lamentin (très bien achalandé au demeurant) pour un ravitaillement en bonne et due forme, nous prenons la direction de l’Anse d’Arlet, une très jolie baie à quelques miles au Nord du Marin.
C’est là que nous passerons le nouvel an en compagnie de nos deux « bateaux-copains ». Foie gras, œufs de saumon, grillades, champagne (petite pensée pour le patron du Poséidon à La Grande Motte et de son équipe en débouchant la bouteille qu’il nous avait offerte le jour de notre départ ! Nous l’avions gardée comme promis pour la déguster aux Antilles en son honneur.), tout y était.
La soirée fut de nouveau l’occasion d’aborder la question du trajet à venir. Partir directement vers le Nord ? Passer aux Grenadines malgré la pression des locaux qui se fait semble-t-il de plus en plus pesante ? poursuivre jusqu’aux Roques ? Nous en sommes tous au même stade avec quelques impératifs pour certains : LouiseAnna doit passer le canal de Panama avant mi-avril, et Pouplier retrouve de la famille en Guadeloupe fin Janvier. Les autres navigateurs que nous croisons se posent tous la même question.
Après une semaine de réflexion et des échanges avec les équipes du chantier Outremer, nous avons finalement décidé de commencer par les Grenadines, de poursuivre jusqu’aux Roques (les derniers échos que nous avons eus sont très rassurants quant à la situation sécuritaire de ces îles au large du Venezuela) puis de remonter directement jusqu’à St Martin ou les BVIs avant de cheminer d’île en île jusqu’aux Bahamas. Et fin Juin nous laisserons Moutik quelque part entre les Bahamas et la Floride pour le faire convoyer jusqu’à la Grande-Motte où il sera vendu.
Ce ne sont que des grandes lignes et elles peuvent encore bouger, mais on sait maintenant à peu près quel sera notre parcours pour les 6 prochains mois.
En attendant, nous profitons pleinement du mouillage de la petite anse d’Arlet. L’eau est limpide, la plage charmante et un petit relief de corail, à une cinquantaine de mètres du bord de mer, permet de faire du masque et tuba dans des conditions idéales avec les enfants.
A nous les poissons porc-épic, poissons perroquet princesse, girelle-paons à tête bleue, pourceaux dos noirs, poissons-anges et autres beautés à écailles dont regorgent ces eaux tropicales. Mais mes préférées restent les tortues qui viennent passer une tête à quelques mètres du bateau à n’importe quelle heure de la journée. Quel bonheur de pouvoir nager près d’elles et de les observer voler dans l’eau. Quelle grâce, quel calme… et en plus elles bouffent les méduses !!!!!! Punaise, on les aime.
Entre ces baignades, quelques balades à pieds, plusieurs apéros, nous passerons 4 jours de rêve dans cette baie.
Puis retour au Marin. Bein oui, la vie est belle mais il y a quand même toujours des trucs à réparer sur un bateau… Cette fois, c’est notre pompe à eau qui flanche. Cette pompe sert à alimenter tout le bateau. Donc difficile de s’en passer. Eric démonte la pompe défectueuse et découvre que le circuit électrique est rempli d’eau douce… il y a une fuite au niveau d’un des filetages de la pompe. Verdict du SAV Outremer : défaut de fabrication. Coup de chance, le broker du chantier arrive au Marin dans 4 jours. Il nous apportera les pompes de rechange.
[ouais… ben j’m’en suis vu de toutes les couleurs avec ces pompes… jusqu’à finir par les désosser complètement. En ouvrant le compartiment du moteur électrique… l’eau graisseuse s’est mise à ruisseler : le joint “SPI” est probablement défaillant et l’eau pompée passe dans le moteur. Les charbons s’usent alors à vitesse V et le moteur fini par être mal/pas alimenté : la pompe se bloque.]
LouiseAnna doit aussi retourner au Marin pour quelques réparations. Nous ferons donc route commune.
Et nous n’y prendrons aucun plaisir ! Vent soutenu de face, houle cassante venant de trois-quart avant. Les filles et moi-même n’avons quasiment pas navigué depuis plus d’un mois… nous passerons tout le trajet allongées, vaseuses, mais aucun vomi à signaler. Eric devra même enfiler son gilet de sauvetage pour aller au mât prendre un ris.
Arrivés au mouillage de Sainte Anne (blindé de bateaux), nous jetons l’ancre avec la ferme intention de rejoindre au plus vite la terre ferme et nous remettre de cette navigation devant un ti’punch…
Eric se précipite pour descendre l’annexe et … glisse sur la jupe arrière… PLOUF… PPOUFFFF…. BIIIIIIIIIPPPP…
Outre le fou-rire général qu’elle a déclenché ; sa cascade nous a permis de vérifier l’efficacité de nos gilets auto-gonflants et de nos balises de détresse. A peine avait-il touché l’eau qu’une alarme se déclenchait et qu’un « MOB » (Man Over Board) apparaissait sur les écrans de tous les bateaux alentours, avec la position AIS dudit bonhomme.
Cette fois-ci c’est l’homme qui a failli, pas la technologie.
5 commentaires
Antoine Bonnefis
Bonjour à toute la petite famille. Tout d’abord, Catherine et les enfants se joignent à moi pour vous souhaiter une bonne et heureuse année. On etait heureux de voir Aurélie et les filles à Paris en Décembre. On a bien pensé à vous lors du déjeuner de l’epiphanie samedi dernier. Continuez à nous faire rêver. On en a bien besoin. On vous embrasse très fort. Antoine et Catherine
Delepau
Il a l’air heureux le capitaine dans son gilet de sauvetage ! Jaune certes mais plus exotiques que ceux que l’on croise à paris !!!
Toujours un plaisir de vous lire et surtout des photos et encore des photos qui nous font rêver !!
Bises
HD
GERARD FITOUSSI
Bonne Année à toute votre équipe !!!!!
Si vous allez aux BVI’s ne ratez pas le mouillage à West Dog (non abrité, c’est juste une étape de jour) où les plongées sont magnifiques le long tu tombant de ces rochers. Et je vous prescris de boire un PainKiller à la santé de ceux qui se les pèlent dans la grisaille de Paris ! (pas de bar à recommander précisément, tous ceux que j’ai bus dans cette zone géographique étaient parfaitement adaptés à ce qu’on pouvait en attendre !)
Je vous embrasse affectueusement ! G
Agathe
Quand on vous lit, on voit bien ceux qui ont de vrais problèmes : Grenadine, pas Grenadine, maintenant, plus tard …? Chez nous, pas de problème, l’arrivée d’eau fonctionne, le cumulus aussi! Et y a pas de méduse, donc pas besoin de tortue…. Non, aucune jalousie dans mon propos, juste des news d’ici, où les gilets jaunes sont bien plus sonores que vos alarmes, comme le souligne Hugues. Bon, ramenons-la un peu : la neige était dure mais abondante à Val pendant 15 jours, il faisait hyper beau, on a bu et bouffé du fromage et de la charcuterie comme des fauves…. la Peau de Vache est égale à elle-même, et …. on a grossi. Et puis là je pars en séminaire pro avec mes gentils associés pour parler d’argent pendant 2 jours dans un Chateauform, bref, la vraie vie, c’est super! On veut d’autres photos et d’autres histoires ! Biz.
Droalen Jacqueline
Tout d’abord bonne continuation au Karibuni qui m’a laissé en effet de merveilleux souvenirs.
Ravie d’avoir passé 10 jours avec vous sur le bateau , cela me permet de mieux vivre vos récits.
Il manque une photo des filles avec masque et tuba ;o)
Je rêve avec vous , j’adore le gilet jaune d’Eric ….
J’étudie votre parcours sur carte mes connaissances géographiques étant imprécises .
Bisous